Bellamy est un homme tout ce qu’il y a de plus normal – ou presque. Et il en est fier. Pourquoi presque ? Parce que ce jeune homme de vingt neuf ans est, et a toujours été, surdoué. Un génie, curieux et doté d’une soif d’apprendre quasiment insatiable. Il n’est pourtant pas le fils de grands scientifiques qui l’auraient plongé dès son plus jeune âge dans cet univers complexe que sont les sciences, loin de là. Ils étaient des gens tout à fait normaux, dont la vie aurait pu sembler banale et inintéressante aux yeux de beaucoup, mais cela n’avait aucune importance pour Bell, qui s’en contentait. Des parents aimants, une petite sœur qu’il adorait, il avait tout pour être heureux. Et il l’était.

Il n’était pourtant pas du genre à avoir plein d’amis à l’école, et ses professeurs se sont vite rendu compte que quelque chose était différent chez lui. Malgré son intelligence, il avait parfois des difficultés à suivre ce qui se passait en cours. Il était distrait, se socialisait peu avec les autres enfants bien qu’il soit capable d’avoir de longues conversations avec des plus âgés que lui, posant des questions parfois en total décalage avec celles que poserait un enfant de son âge. Il lui a été reproché nombre de fois d’être dans la lune, préférant souvent se plonger dans un livre sur les dinosaures, dont il était passionné à l’époque, plutôt que de courir avec les autres enfants dans la cour de récréation, mais incapable de suivre le rythme imposé par ses professeurs lors de la classe. A force de remarques et autres commentaires, ses parents ont donc décidé de voir un professionnel et c’est là que le verdict est tombé : Bellamy n’était pas un enfant dissipé, et il était loin d’être stupide. C’était tout à fait le contraire : il était surdoué, son esprit ne fonctionnait pas comme celui des autres enfants de son âge, et les répétitions constantes et le rythme des cours n’y étaient pas adaptés.

Fiers de leur fils, mais ne souhaitant pas en faire un enfant totalement coupé du monde et entouré seulement de personnes comme lui, ses parents refusèrent de lui faire intégrer une école spécialisé et préférèrent lui faire poursuivre sa scolarité dans le système « normal ». Bien sûr, il sauta quelques classes et ses professeurs furent chaque fois informés de la petite particularité du garçon, ce qui lui permis de suivre une scolarité à peu près normale, quoi qu’accélérée. Il n’a jamais fait partie des populaires de l’école, et était souvent l’objet de raillerie de la part de ceux qui composaient « l’élite » de l’école, puis du lycée. Mais Bell s’en moquait, les trouvant tellement stupides que leurs moqueries ne lui faisaient pas le moindre effet. Il avait un temps essayé de se faire passer pour plus stupide qu’il était pour se fondre dans la masse, se disant qu’être comme tout le monde lui faciliterait la vie, mais il s’était vite aperçu que cela ne lui apporterait rien. Il avait une belle vie, même si à son plus grand regret, ses parents ne cédèrent jamais à ses demandes : il voulait un singe, ne lui demandez pas pourquoi, il en a toujours voulu un et ne saurait se l’expliquer. Tout ce qu’il obtint, ce fut une peluche. Quelques amis proches, sa famille, ses loisirs et passions qui occupaient le plus clair de son temps : après les dinosaures, ce fut l’espace qui le passionna et il voulu un temps devenir astronaute pour aller voir cela de plus près, puis vint la physique.

C’est ce domaine qu’il décida d’étudier quand il rejoint Harvard à la sortie du lycée avec trois années d’avance, grâce à une généreuse bourse obtenue pour ses exploits académiques. Trouver sa place dans cette université de l’Ivy League, l’élite des universités américaines, fut plus aisé pour lui que cela ne fut au lycée. Il était entouré de personnes tout aussi enthousiastes que lui, qui avaient la même soif d’apprendre, de découvrir toujours plus de choses, la même curiosité pour le monde qui les entoure… Il fut un étudiant brillant, toujours aussi passionné – parfois un peu trop, si bien qu’il avait tendance à se lancer sur plusieurs projets à la fois.

Il avait tout pour être heureux, n’est-ce pas ? Mais bien sûr, la vie n’est pas un long fleuve tranquille et cela, tout le monde le sait…

Il avait 19 ans quand sa vie fut irrémédiablement bouleversée. C’était pourtant un jour comme les autres, il était de retour chez lui après plusieurs mois d’absence passés à l’Université, heureux de revenir dans sa Caroline du Nord natale pour les vacances de Noel et surtout, de retrouver ses parents et sa sœur cadette. Mais à l’approche de la maison, il su d’instinct que quelque chose clochait. Sa sœur avait l’habitude de l’attendre avec impatience et de se précipiter dehors dès que le taxi qui le déposait de l’aéroport se garait devant leur petite maison dans la campagne non loin de la ville de Charlotte. Mais là personne, malgré la porte d’entrée grande ouverte… Depuis ce jour, il déteste les fêtes de fin d’année, qui ne font que lui rappeler les horreurs qu’il a vues en entrant dans la maison. Le sang, les corps sans vie de ses parents, de sa petite sœur… Il revit la scène chaque année quand approche l’anniversaire de ce jour fatidique, se plongeant dans le travail pour oublier. Il avait bien essayé de les réveiller, de voir s’il y avait quelque chose qu’il pouvait faire, n’importe quoi. Il n’était pas médecin, mais il n’était pas idiot bien au contraire… Mais c’était déjà trop tard. Tétanisé, les mains couvertes du sang de sa famille, il n’avait même pas appelé les secours, incapable de réagir. Il n’entendit même pas les voitures blindées se garer devant la maison,  ne réagissant que lorsque des hommes et des femmes en costumes avaient envahi les lieux, le forçant à sortir sans lui donner la moindre explication, refusant de répondre à la moindre de ses questions bien qu’ils ne manquèrent pas de lui en poser. Ca devait d’ailleurs bien être la première fois de sa  vie qu’il n’avait aucune explication, qu’il se retrouvait muet face aux interrogations des agents.

Ce fut cet événement tragique qui le poussa à envisager une nouvelle trajectoire professionnelle et c’est endeuillé qu’il intégra l’académie de sciences du SHIELD, l’organisation à laquelle appartenaient les agents qui avaient débarqué sur les lieux du massacre. Endeuillé, mais déterminé à un jour obtenir des réponses à ses questions.  

Solitaire, renfermé et pas d’humeur à la socialisation, déjà que ça n’avait jamais été son truc, il resta seul les premiers temps, ne se mêlant pas aux autres même lorsque ceux-ci tentaient de faire le premier pas. Tout ce qui comptait, c’était être le meilleur, finir l’académie le plus vite possible et devenir un agent afin d‘avoir  accès au dossier de sa famille. Mais il fit une rencontre qui changea tout cela et adoucit peu à peu la douleur de la perte de sa famille. Evalee. Tout le monde la surnommait Evie, mais lui décida de l’appeler Lee histoire de ne pas faire comme tout le monde. Il l’avait rencontrée au labo, elle s’était présentée alors qu’elle l’avait rejoint pour partager sa paillasse, engageant la conversation. Il ignore encore pourquoi, mais au bout de seulement quelques minutes elle parvint à lui arracher un sourire, ce qui relevait de l’exploit à cette période de sa vie. C’est ce qui le décida à lui laisser une chance, allant jusqu’à l’inviter à se joindre à lui à la pause déjeuner, alors que depuis son arrivée à l’académie il avait passé chacun de ses repas seul.

Ils devinrent rapidement inséparables. Si vous croisiez l’un des deux, il y avait de fortes chances que l’autre soit quelque part dans le coin. Rares étaient ceux à connaître le passé morbide du jeune homme, et ceux qui le connaissaient ne l’avaient pas appris de sa bouche, mais il s’ouvrit à elle, se surprenant lui-même. Ils finirent ensemble l’académie et s’arrangeant pour rejoindre la même équipe. C’était limite si ils ne venaient pas en lot, soit vous preniez les deux, soit aucun. Mais ils travaillaient si bien ensemble, étaient sur la même longueur d’ondes. Pourquoi séparer une telle équipe, n’est-ce pas ?

Dès l’instant où il devint officiellement un agent, Bell se procura le dossier concernant le meurtre de sa famille et c’est ainsi qu’il apprit qu’un mutant était derrière le massacre. Il s’était douté qu’il s’agissait de quelque chose du genre sinon le SHIELD ne se serait jamais impliqué, mais il en avait le cœur net et lui qui avait toujours été méfiant envers les personnes dotées de pouvoirs et ne s’en était d’ailleurs jamais caché, en arriva à les craindre et pire, à les détester, se faisant un devoir d’inventer des armes et autres gadgets pour contrer leurs capacités.

Sa vie aurait pu demeurer ainsi. Il aurait préféré, d’ailleurs. Mais un événement vint encore une fois changer la donne, brisant sa relation avec la personne la plus importante à ses yeux, pour laquelle il en était d’ailleurs arrivé à éprouver des sentiments autres que de l’amitié, même s’il n’en dit jamais rien de peur de briser leur complicité. Lui et Lee furent envoyés en mission ensemble avec toute une équipe et rien ne se passa comme prévu. Les deux jeunes agents, peu habitués au terrain, se retrouvèrent séparés du reste du groupe et pris au piège. Ils eurent beau attendre plus ou moins patiemment, les heures s’étiraient et personne ne semblait leur venir en aide. Ils étaient seuls, et si l’un d’eux devaient s’en sortir, il savait lequel des deux devaient sortir de ce bâtiment vivant, et ce n’était pas lui.

« Je vais faire diversion, toi tu t’échappes ok ? » lui dit-il, prenant ses mains dans les siennes. Il ne pouvait pas la perdre elle aussi, et il était déterminé à lui permettre de s’échapper, même si ça devait être la dernière chose qu’il ferait de sa vie. « [color:76e4= #C24366]Quoi ? Non, je ne pars pas sans toi ! » protesta-t-elle, confuse. Il ne la laissa pas poursuivre. Au lieu de cela, il prit son visage entre ses mains et l’embrassa, la perspective de ne peut être pas ressortir vivant de ce trou lui donnant un élan de courage. « S’il te plait… » la supplia-t-il presque, laissant un instant son front contre celui de la jeune femme avant de s’écarter, prêt à foncer dans le tas et priant pour qu’elle ne perde pas cette opportunité de s’échapper. Mais il n’eut rien le temps de faire qu’il la senti le pousser avec une force qu’il ne lui connaissait pas, atterrissant à plusieurs mètre de là, arrêté par le mur. Légèrement sonné, il se redressa pour voir Evalee faire face à leurs adversaires avec une force spectaculaire. Il les vit la blesser et pourtant, lorsqu’elle revint vers elle elle ne portait aucune trace de blessure, sinon le sang qui tachait ses vêtements…

Ils parvinrent à s’enfuir, mais rien ne fut plus pareil après cela. Bellamy ne pouvait plus la regarder en face. Il était en colère, certes, mais par-dessus tout il se sentait trahi. Elle savait tout de lui, et depuis toutes ces années, elle n’avait pas une seule fois songé à lui avouer la vérité. Il ignorait si cela aurait changé quelque chose, s’il aurait réagi différemment, et dans le fond, ils ne le sauraient jamais. Il alla jusqu’à la menacer de la dénoncer pour qu’elle soit ajoutée à l’index, mais ne pu se résoudre à le faire, ces foutus sentiments qu’il avait pour elle le poussant malgré tout à la protéger, même si il la détestait et ne pouvait plus lui accorder cette confiance aveugle qu’il avait eu en elle jusque là. Il demanda à être transféré vers un autre laboratoire, ne supportant plus de la croiser tous les jours, remuant chaque fois un peu plus le couteau dans la plaie. Avec cette nouvelle équipe, il redevint le jeune homme renfermé qu’il avait longtemps été, absorbé par son travail, solitaire, et surtout évitant soigneusement tous les endroits où il risquait de croiser celle qui était à l’origine de ces sentiments conflictuels qui le rongeaient. Il n’avait jamais été doué dans ses relations avec les autres et les sentiments étaient une chose à laquelle il n’avait de toute façon jamais réussi à trouver un sens. Comment pouvait-il la détester à ce point, elle était après tout tout ce qu’il haïssait et s’était juré de combattre en rejoignant le SHIELD, et en même temps l’aimer de la sorte ? Ca n’avait aucun sens, et il détestait les choses qui n’avaient pas de sens…

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