JUIN 2015 – DÉBUT DU RESTE DE LA VIE.
La poignée en plastique blanc de la fenêtre craque sous le coup de main un tantinet trop puissant de Jane qui tente pourtant - tant bien que mal - de maitriser l’apparente et incroyable intensité de sa force. Ce faisant, une moue étrangement excédée se dessine sur son visage, de ces moues naturelles, mais qu’on semble lui voir de plus en plus souvent ces temps-ci. De ces moues qui vous tordent alors les lèvres d’un rictus improbable et particulièrement drôle à voir, du moins bien assez drôle - semble-t-il - pour assurer de longues (presque interminables) minutes de rire au propriétaire du petit appartement dans lequel la demoiselle a élu domicile quelques jours, à peine, plus tôt. Dean Martell, charmant brun - ténébreux et mystérieux - sauveur à l’âme charitable dont elle partage la vie au quotidien et parfois même les nuits - en tout bien tout honneur, il en va de soit. Il est l’unique chose sur laquelle Jane se sent de compter bien qu’ils ne se connaissent pas le moins du monde, ni d’eve ni même d’adam ou - du moins - pas tellement.
Assise au creux du clic-clac, déplié au centre du salon de l'appartement, Jane chasse de son esprit - du mieux qu'elle le peut - ces pensées en pagaille. Ce tandis qu'elle bas des cils, les yeux perdus dans le vague de la contemplation de ses deux paumes qui se ferment et se rouvrent presque machinalement. Epuisée et légèrement enivrée du silence environnant, c'est doucement mais avec la détermination d'enfin trouver le sommeil, qu'elle se love enfin entre ses draps clairs, avant de ne lâcher un de ces bâillements peu sexy dont elle seule a le secret et d'enfin rejoindre les bras de Morphée en quelques instants. ★ ★ ★
AVRIL 2015 – FLASHBACK.
Un bruit fort, profond et sourd tire Syn de son sommeil, en sursaut et sans ménagements. Il ne lui suffit, pourtant, que de quelques instants pour reprendre ses esprits tandis qu’elle se remémore la sombre cellule capitonnée dans laquelle elle se trouve - allongée à même un vieux matelas moisit et installé à sur le sol poussiéreux. Rétablie mais néanmoins encore un tantinet affaiblie des litres de sang qu’il lui manque, les bras encore légèrement endoloris bien que déjà parfaitement cicatrisés. Elle se redresse avant d’aller se rouler en boule dans l’un des quatre coins de la pièce, secouée par la douleur psychique et la colère viscérale qui la hantent. D’étranges bruits résonnent à l’extérieur et ce sont ses deux yeux qui s’écarquillent lorsque la porte de la cellule s’ouvre sur une étrange ombre, au sexe indéterminée, dans la raie de lumière qui éclaire l’embrasure. Une omble qui disparait tout aussi vite qu’elle est apparue.
C’est là, maintenant. C’est son ticket de sortie. La route à suivre est juste là - devant elle - et fidèle à son impulsivité, habituellement désastreuse, Syn se précipite à l’extérieur. Elle entame - avec une fougue et une ardeur incroyables - cette course pour la vie à laquelle elle s’accroche toutes griffes dehors. Envoyant valdinguer de-ci de-là et d'une force incroyable les gardes du Shield qui lui barrent la route. Elle n'hésite pas - non plus - à se précipiter tête baissée dans les grandes baies vitrées de verres qui la sépare encore de l’air libre de sa terre d’accueil.

Même une fois dehors, l’Asyne en exile et abîmée continue sa course effrénée, ignorant les coupures - aussi nombreuses soient-elle - qui couvrent sa peau et la pique au contact de l’air froid. Cependant, maintenue enfermée et coupée du monde bien trop longtemps, elle ne réalise pas ce qu’il se passe lorsque ses sens lui font soudain défaut. Aussi, c’est l’ouïe secouée par le bruit du klaxon trop criard, qu’elle ne s’aperçoit que bien trop tard de l’engin contre lequel elle fonce tout droit terminer sa course. Le quatre roues à l’arrêt et chamboulant la quasi totalité de la circulation environnante, c’est une Syn éreintée et salement amochée qui profite de la cohue générale, s’empare de ses dernières forces et escalade un grillage beaucoup trop haut à son goût avant d’aller se cacher - du mieux qu’elle le peux - dans une grosse benne à ordure, à l’arrière même de la cours de ce qui semble être un petit restaurant. Dans cette cachette improvisée l’odeur est entêtante et pas franchement terrible, autant dire - même -  qu’elle ne se souvenait pas que ce soit aussi désagréable. Pourtant, l’Alien n’a pas le temps de regretter ce choix, qu’elle perd connaissance comme vidée de toute énergie. A demi-morte. ★ ★ ★
Finalement tirée de son sommeil agité, Jane allume la petite lampe de chevet - posée au sol, tout près d’elle et probablement éteinte par Dean quelques heures plus tôt. Elle se redresse doucement, difficilement - les yeux encore semi-fermés par la fatigue - puis, elle passe la main sur son front comme pour en essuyer les petites gouttes de panique en perle. Finalement, encore secouée de ces images qui hantent son esprit - presque chaque nuit - et qu’elle ne comprend pas, c’est les jambes hésitantes qu’elle se glisse hors des draps pour rejoindre le petit couloir menant à l’unique chambre de l’appartement.
Là, debout devant la porte, elle s’arrête quelques minutes - l’esprit vide comme pour simplement laisser s’écouler un peu de temps - avant de se saisir de la poignée. Une jolie poignée, un peu ancienne, avec une drôle de pierre et du bois. La petite poignée de la porte. Une drôle de poignée - probablement - trop fragile, puisqu’une fois encore elle lui reste entre les doigts tandis que la porte s’entrouvre doucement et qu’elle lâche un de ces habituels jurons incompréhensibles. Finalement, peu silencieuse et pas franchement discrète, Jane se faufile dans cette nouvelle cellule sombre et à quatre murs. Mais, cette fois-ci, c’est le cœur léger et enivré d’un étrange sentiment de sécurité qu’elle le rejoint, enfin sereine.

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